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Histoire, archéologie et iconographie de la culture matérielle (bilan)

Les résultats des fouilles, l’ethnologie, l’iconographie et les textes, notamment les sources normatives et les archives, étudiés par certains des membres du GAM, fournissent des croisements multiples et fructueux afin de mieux cerner la civilisation matérielle du IXe au XVe siècle, dans la perspective d’obtenir une vision globale et évolutive de l’histoire des techniques et de la consommation.

Agriculture et techniques agricoles

La vie rurale

L’étude de la vie rurale médiévale à partir des documents iconographiques, en complémentarité avec les sources écrites et archéologiques, est au centre des recherches de Perrine Mane. Ces recherches reposent sur une base de données d’environ 45 000 images réalisée avec la collaboration de Béatrice Marin. Elles l’ont amenée à intervenir, lors de colloques, sur la mise en relation des textes d’agronomie avec les illustrations des jardins, ou encore, en collaboration avec Mickaël Wilmart, sur la confrontation du traité de Jean de Brie avec les archives comptables ou notariales et avec l'iconographie afin d’aboutir à une description de l'organisation de l'élevage ovin dans le nord de la France.

L'intérêt pour l'élevage a également conduit M. Wilmart à s'interroger sur les pratiques vétérinaires, jusqu’alors étudiées à travers les seuls exemples de l'hippiatrie et de la fauconnerie. La confrontation des traités d'hippiatrie, d'économie rurale, de fauconnerie ou de chasse montre non seulement les passerelles existant entre les différentes spécialités, mais aussi une différenciation des pratiques et des discours liée à la fois au prestige social que revêt la possession de tel ou tel animal et à l'intérêt économique qui rend plus ou moins préjudiciable sa perte.

La fructiculture

Prolongeant une ACI CNRS sur l’« Histoire des savoirs » (2004-2007) dont P. Mane était l’un des membres, le GAM a été l’un des trois partenaires d’une enquête sur les fruits et sur la fructiculture dans le cadre d’un nouveau programme ANR (2008-2011) « Fructimedhis : denrées et cultures nouvelles. Perceptions et lectures croisées autour des fruits de la Méditerranée historique » (direction : Aline Durand, LAMM UMR 6572, MMSH, Aix-en-Provence ; co-direction Jean-Frédéric Terral, Centre de bioarchéologie et d’écologie, Institut de Botanique de Montpellier, et Perrine Mane, GAM-CRH), auquel ont participé à 30 % de leur temps trois membres de l’équipe (D. Alexandre-Bidon, P. Mane et F. Piponnier). La confrontation de sources variées, incluant les sciences de la nature, a permis d’approcher sous différents angles la notion de nouveauté alimentaire ou médicale.

Un colloque a été organisé par les membres de l’ACI : « Histoire des fruits. Pratiques des savoirs et savoirs en pratiques » (Toulouse, 2007) ainsi que, dans le cadre de l’ANR, plusieurs journées de séminaire traitant des « Fruits du soleil » ou des « Denrées et cultures nouvelles en Méditerranée historique » (Paris, Museum d’histoire naturelle, janvier 2010). Nos différents groupes de recherches ont également préparé la publication de plusieurs ouvrages : d’une part, un numéro spécial de la revue internationale Food and history consacré aux variétés anciennes, à la mise en culture des arbres fruitiers et à la consommation des fruits, d’autre part, un volume portant sur Le palmier-dattier en Occident aux époques historiques (Presses universitaires de Rennes). Enfin, bénéficiant de ces trois années de recherches, un séminaire de l’EHESS : « Regards croisés sur la civilisation matérielle médiévale » (en collaboration P. Mane et D. Alexandre-Bidon) s’est concentré sur l’étude des céréales (2008-2009), puis de la fructiculture (2009-2010), et enfin de la viticulture (2010-2012).

Histoire comparée des techniques agricoles

L’étude des techniques agricoles à partir de sources croisées a conduit P. Mane à partager la responsabilité avec C. von Verschuer (EPHE/SHP) et F. Sigaut (EHESS/CNAM) d’un GDR sur l’« Histoire comparée des techniques agricoles ». Ce groupe de travail a pour objectif l’histoire de l’agronomie à l’époque médiévale et moderne dans un cadre géographique très vaste, puisqu’il englobe aussi bien l’Europe occidentale que l’Asie centrale, l’Asie du Sud-Est et le Japon. Dans le cadre de ce GDR, se sont tenues régulièrement ces dernières années des « séances-ateliers » sur un thème permettant une comparaison détaillée entre l'Occident et l'Extrême-Orient. Ces séances ont débouché sur l’organisation d’un colloque ayant pour sujet : « Agricultures orientales et occidentales (Ressources et recherches) » (Paris, École française d’Extrême-Orient, mars 2009).

De ce groupe de travail, est né le projet d’un glossaire des termes de l’agriculture : Techniques agricoles : un glossaire français-anglais-chinois-japonais (La céréaliculture) dont P. Mane est l’une des initiatrices et la co-responsable. Dans sa première mouture, il porte sur la céréaliculture et se poursuit par les termes de l’horticulture. Ce glossaire, qui compte déjà plus de mille mots, est mis progressivement en ligne.

 

Artisanat et savoirs techniques

Différents domaines de l’artisanat ont été étudiés par les membres du GAM. Les outils, les techniques, la transmission des savoirs, mais aussi l’étude des objets manufacturés sont au centre de ces études.

Études générales sur l’artisanat

Au sein du PCR « Habitat rural du Moyen Âge dans les Pays de Loire » (dir. A. Valais), P. Mane a établi une comparaison approfondie des documents iconographiques (miniatures et peintures murales) relatifs aux outils agricoles et artisanaux, avec les objets archéologiques en provenance des fouilles de cette aire géographique.

Par ailleurs à l’occasion d’une exposition du Musée des Beaux-Arts de Bilbao (La mujer gótica), une étude sur la répartition du travail, tant agricole qu’artisanal entre hommes et femmes, a prolongé des études antérieures menées par P. Mane.

Artisanat et alimentation

Aboutissement de la céréaliculture, mais aussi métier à part entière, même si la fabrication domestique du pain conserve une place prépondérante au Moyen Âge, le métier de boulanger a été étudié par P. Mane à partir des livres des métiers et les nombreux documents iconographiques.

Techniques et textiles, vêtements ou parures

Sophie Desrosiers a étudié les rapports entre textiles et sociétés. Outre des informations d’ordre matériel comme les fibres et les colorants dont ils sont constitués, qui nous renseignent sur les rapports des sociétés avec leur environnement ou sur leurs échanges à plus ou moins longue distance, les textiles conservés nous fournissent des informations sur l’identité, le statut social, les possibilités économiques, les croyances et le pouvoir de leurs possesseurs, tout comme la place des sociétés dans les échanges.

La reconstruction des connaissances nécessaires à leur fabrication permet, de plus, d’analyser certaines formes de savoirs conceptuels dans quelques cas fortement liés à des logiques et comptages mathématiques. Du point de vue méthodologique, S. Desrosiers se fonde autant que possible sur l’observation des techniques encore pratiquées aujourd’hui afin de pouvoir, d’une part, comprendre ces aspects mathématiques, d’autre part, interpréter les signes que laissent les procédés dans la matérialité des textiles du passé. La recherche des caractéristiques principales des productions de différentes régions et leur comparaison permet de suivre les circulations des objets et des savoirs.

Parallèlement, S. Desrosiers a entrepris une étude de vêtements liturgiques ou funéraires des sépultures mérovingiennes de la basilique de Saint-Denis, qui a permis de préciser la diversité des approvisionnements en soierie de la cour mérovingienne.

Relevant d’une autre aire géographique et culturelle, des recherches sur les textiles des Andes ont été menées par S. Desrosiers afin de comparer les pratiques actuelles dans les hautes terres boliviennes avec les très nombreux textiles archéologiques découverts sur la côte du Pérou. Cette étude permet de comprendre les oppositions importantes entre les pratiques régionales – hautes terres et côte des Andes centrales et centre-sud –, et donc la forte influence des hautes terres sur la côte à diverses périodes, en particulier pour la culture Paracas (200 av.-150 apr. J.C. environ) dont une partie des broderies, qui ont constitué le thème d’une exposition au Musée du quai Branly au printemps 2008, sont des imitations de pièces importées des hautes terres.

Giustina Ostuni a, quant à elle, poursuivi sa recherche sur les bijoux byzantins (VIe-XIIIe siècle). Dans ce cadre, une collaboration avec le Musée d’art et d’histoire de la ville de Genève a été engagée. Elle a permis l’étude d’un groupe de bijoux inédits et singuliers, qui a fait l’objet d’une publication (2011). Durant les prochaines années, cette collaboration se poursuivra autour d’une série d’ornements provenant de la prestigieuse collection Zacos (Genève).

 

Savoirs et médecine

Céramique

La production céramique médiévale et moderne en France et plus particulièrement en Saintonge (potiers de la Chapelle-des-Pots) ou en Île-de-France (tuiles glaçurées et terres cuites architecturales), mais aussi son transport et sa vente a été largement abordée par J. Chapelot.

Les compétences de D. Alexandre-Bidon en matière de céramologie l’ont conduite à mener à bien un projet de recherche sur les pots de pharmacie, envisagés sous trois aspects : les ustensiles eux-mêmes en tant qu’objets de santé et de métrologie ; une archéologie des écritures, fondée sur l’approche paléographique de la nature des inscriptions et des systèmes d’abréviations, ainsi que la reconnaissance de la présence de scribes et de clercs dans les ateliers de potiers ; une étude de l’iconographie des vases pharmaceutiques, avec la reconnaissance d’images médicales jusque-là ignorées : portraits de malades, floraire spécialisé dans les simples médecines, images astrologiques, mais aussi images mémorielles destinées au rangement des produits dans la tradition de l’ars memorativa. Ce projet a donné naissance à un livre dont le manuscrit a été accepté par les Editions Picard, et qui sera publié en 2013 dans la collection « Espaces médiévaux ».

Médecine

M. Wilmart s’est penché sur l’histoire d'un handicap : la cécité au Moyen Âge. À partir des sources briardes, il a, dans un article consacré aux aveugles dans le diocèse de Meaux, esquissé une approche sur les causes de la cécité, les difficultés et les solidarités rencontrées par les aveugles et enfin les structures destinées à les encadrer ou les accueillir. Cette étude repose sur le dépouillement de récits de miracles, ainsi que sur les données disponibles sur les hôpitaux de la région.

D. Alexandre-Bidon s’est intéressée non seulement à des thèmes généraux en relation avec la médecine, telle l’hygiène, la puériculture et la pédiatrie, mais s’est aussi penchée sur des problèmes plus ponctuels, comme les représentations de la vie hospitalière à travers l’iconographie, la conservation des médicaments ou encore à la notion d’obésité au Moyen Âge. Enfin, dans la double optique des soins curatifs et de l’hygiène, É. Hubert a étudié les bains de Rome et du Latium à travers les textes et l’archéologie.

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